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Un récent arbitrage vient rappeler aux employeurs l’importance d’exercer leurs droits de gestion de manière raisonnable et respectueuse de la vie privée des employés. Dans cette affaire Intitulé : Syndicat des travailleuses et travailleurs de la Brasserie Labatt (CSN) et Brasserie Labatt (C.A.L.), 2024 QCTA 514, une travailleuse d’une brasserie a contesté un avis écrit imposé après avoir quitté son quart de travail plus tôt en raison de crampes menstruelles, sans fournir de certificat médical. L’arbitre a donné raison à la salariée et ordonné le retrait de l’avis de son dossier.
Les faits : un départ hâtif et une demande contestée
La plaignante, opératrice à l’empaquetage, effectuait un quart de travail prolongé en temps supplémentaire. Après plusieurs heures, elle a ressenti de fortes crampes menstruelles et souhaité rentrer chez elle, ne disposant pas de protection hygiénique adéquate. Sa superviseure lui a alors demandé de fournir un billet médical pour justifier son départ. La salariée a refusé et a quitté le travail, ce qui lui a valu un avis écrit pour absence non justifiée.
Le syndicat a contesté cette mesure disciplinaire, arguant que l’exigence d’un certificat médical était abusive, surtout après que l’employeur ait été informé de la nature de son malaise.
La décision du tribunal : une exigence déraisonnable
L’arbitre a conclu que la demande de billet médical n’était pas justifiée et a ordonné le retrait de l’avis disciplinaire du dossier de la salariée. Voici les principaux éléments retenus :
Le droit de l’employeur d’exiger un billet médical n’est pas absolu
Bien que l’employeur ait un pouvoir discrétionnaire pour demander un justificatif médical, ce droit doit s’exercer de manière raisonnable et non abusive.
Le maintien de la demande était injustifiable
Une fois que l’employeur a appris que l’absence était liée à des crampes menstruelles, insister pour obtenir un certificat médical devenait excessif.
Un médecin n’aurait pas pu objectiver la douleur ressentie, rendant la demande inutile.
Respect de la vie privée et du bon sens
Exiger une consultation médicale pour une absence de quelques heures liée à un phénomène naturel et temporaire constitue une atteinte à la vie privée.
Obliger une employée à se rendre à l’hôpital ou en clinique pour un problème aussi personnel est une perte de temps et de ressources.
Leçons pour les employeurs
Cette décision rappelle aux gestionnaires que l’application des politiques internes doit être guidée par le bon sens et le respect des droits fondamentaux des employés. Voici quelques recommandations :
Évaluer chaque situation au cas par cas : Une demande de billet médical doit être justifiée par des motifs sérieux, comme un absentéisme récurrent ou un doute légitime sur la véracité de l’absence.
Respecter la vie privée des employés : Les informations médicales sont sensibles et doivent être traitées avec discrétion.
Privilégier une approche humaine et compréhensive : Une bonne communication avec les employés permet souvent d’éviter des conflits inutiles.
En somme, cette affaire démontre qu’un excès de rigidité dans l’application des politiques peut mener à des décisions injustifiées et être contesté avec succès. L’équilibre entre la gestion des absences et le respect des droits des travailleurs demeure essentiel pour un climat de travail sain et productif.